À la poursuite du bourdon revêt plusieurs significations. C’est tout d’abord l’évocation d’un parcours effectué, ayant pour objectif la composition d’un paysage sonore à partir d’une collecte d’éléments : des enregistrements de terrain (field recording), des objets qui offrent une qualité acoustique particulière, ou encore du texte extrait de discussions et de rencontres locales. Ce cheminement s’est déroulé sur le territoire du Val de Loire inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, il en donne ainsi un aperçu sensible qui favorise l’écoute du paysage plutôt qu'un regard visuel. Le territoire en question est vaste (800 km²), et le parcourir en vain prend du temps. À la poursuite du bourdon est une manière de rassembler plusieurs thématiques dans une quête restée ouverte aux événements imprévisibles.
Le terme bourdon se définit de différentes manières. C’est le nom donné à une cloche d’église lorsqu’elle atteint un certain poids. C'est aussi ce qui désigne les tubes des cornemuses, et ce qui fait référence aux cordes à son fixe des vieilles à roues. On trouvera un bâton de pèlerin surmonté généralement par une gourde ou un ornement en forme de pomme, que l’on nomme aussi le bourdon, le bâton du voyageur. Ce qui donnera sans doute naissance à la pâtisserie faite d’une pomme enrobée de patte à pain dans laquelle on glisse un peu de confiture puis que l’on met au four, et qui s’appelle aussi un bourdon.
Avec ses nombreux sens, l’interprétation du bourdon varie d’une expédition apicole et gourmande, guidée par les traditions, à une aventure d’origine sonore. Ce qu’il faut retenir, c’est le bruit même de son expression verbale, une double résonance qui dure et tourne en rond, une note tenue en harmonie dans l’espace. C’est une boucle sans fin qui se détache du temps présent, une musique cosmique qui évoque le lien unissant l’homme à son milieu.
D’une certaine manière, le bourdon, c’est un silence audible. L’état constant d’un son où l’attente nourrit l’espoir d’entendre l’imprévu. Partir à sa recherche, c’est aussi partir à la recherche du silence, ou plutôt de l’absence de son. C’est retourner au calme insolite que l’on retrouve rarement. Les troglodytes disposent de cette qualité. Espace souvent retranché profondément dans la terre, il vous fait entendre une musique souterraine, presque muette, celle du corps qui se déplace, de l’interaction de l’homme avec son habitat. Une architecture soustractive en paradoxe avec l’événement sonore qui s’y développe, car une fois à l’intérieur, une envie de crier vous prend et vous invite à entendre la réverbération de votre propre voix, à écouter la résonance de chacune des cavités creusées par une main qui voulait s’abriter. Des enregistrements incorporés à la composition évoquent ce rythme de vie si typique des troglodytes.